Harcèlement dans les cabinets d’avocats : des victimes prennent la parole

Le harcèlement au travail représente un phénomène récurrent qui se présente sous différentes formes : harcèlement moral, intimidation, discrimination, harcèlement sexuel ou encore cyberharcèlement. Il est aujourd’hui présent dans tout type d’entreprise, quel que soit le secteur d’activité, y compris les cabinets d’avocats. Toutefois, tout est mis en œuvre pour permettre aux victimes de libérer leur parole. Des plateformes anonymes ont été ouvertes et selon Antoine Beraud, c’est une excellente nouvelle.

Des solutions concrètes pour libérer la parole des victimes

Selon une enquête menée par le Défenseur des droits en 2018, 72 % des femmes et 47 % des hommes avocats déclarent avoir été témoins de discriminations à l’encontre de leurs collègues. Le harcèlement au sein des cabinets d’avocats est une réalité qui est encore à ce jour un sujet tabou.

Toutefois, les victimes commencent à parler et à libérer leur parole grâce à divers dispositifs mis en place, à l’image du service SOS Collaborateurs initié par l’Union des jeunes avocats en 2000. Le Conseil de l’ordre, conscient des enjeux, a également décidé de mettre en place en 2015 une commission dédiée à la lutte contre le harcèlement et les discriminations, la Comhadis. Sa fondatrice, Me Duez-Ruff, explique la volonté du Conseil que cette commission « ne soit pas qu’un lieu d’écoute, mais un lieu d’action ». Dans les faits, la victime rencontre de manière confidentielle un membre de la commission afin d’expliquer sa situation. Un débat contradictoire peut ensuite être organisé avec l’avocat mis en cause. Ce dernier, si les faits sont avérés, peut écoper d’un rappel à l’ordre, voire même une sanction en cas de faits plus graves.

Depuis 2017, la Comhadis a été saisie 95 fois, dont 58 % pour des situations de harcèlement moral.

Les femmes avocates, encore plus touchées depuis la pandémie

La situation de crise sanitaire mondiale a exacerbé les discriminations. En outre, certains avocats n’ont pas hésité à licencier des collaborateurs à cette occasion, et ce, du jour au lendemain.

Malgré les actions mises en place, le harcèlement reste un sujet tabou au sein de la profession. En effet, comme l’explique Karine De Leusse, psychologue du Collectif Défense, « l’avocat est censé représenter les victimes, alors il est difficile pour lui de concevoir d’être la victime ». Pour l’avocate Krystelle Biondi, un autre phénomène renforce la difficulté des victimes à parler : « les avocats ont peur de saisir l’Ordre et cette crainte peut être fondée ».

L’expérience d’une jeune avocate abonde dans ce sens : intégrée dans un petit cabinet, elle a été victime de pressions et d’un contexte « invivable » où elle réalisait 70H de travail par semaine pour un salaire de 900 € par mois. Malgré le fait qu’elle ait été maltraitée et mal payée, l’avocate n’a pas souhaité en parler. La raison ? « Je savais que je pouvais être grillée, ne plus trouver de collaborations en dénonçant la situation ». Toutefois, sur les conseils d’une amie, elle a ensuite pris contact avec le service SOS Collaborateurs mis en place en 2000 par l’Union des jeunes avocats, qui l’a aidée.

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